carnet du maroc 1

je suis à casablanca. sur la corniche. face à la mer. un couple de jeunes gens m'a indiqué la petite épicerie, où me procurer le papier et l'encre. il me faut les feuilles. il me faut les mots silencieux. c'est très simple. on peut trouver le papier très facilement. et écrire. sur le auvent de l'épicerie, la vache qui rit. le monde se lisse aux enseignes des épiciers. les besoins. les désirs. c'est effrayant à ce point. les mêmes choses, les mêmes produits. heureusement pas complètement. et l'air reste gratuit.

je consigne mes vues comme si elles étaient exceptionnelles. comme si elles pouvaient intéresser quelqu'un. sans rien avoir à dire en plus. juste le mouvement d'écrire.

le poème ne vient pas. le poème cale. ne restent que les pensées les plus banales. c'est comme ça. un mot après l'autre. rien de plus. je laisse faire.

un lapsus de lecture : lu la carcasse du soleil au lieu de la caresse.

quand on laisse tomber les effets, le crudité de nos pensées fait peur.
c'est bien, un vulgaire calepin. ça ôte tous scrupules. on peut y aller. franco.

je n'ai rien à t'offrir, rien à te donner, juste mes mains pour te caresser petit chat maigre. je reconnais que c'est maigre, des mains, quand on a faim.

le bleu est sous la couverture des nuages. en grève.

on dirait que les effluves du thé à la menthe montent droit à l'âme.

le cheval, la carriole côtoient le 4x4.

en peinture, fabriquer un beau vert est vraiment difficile. on regarde un brin d'herbe et on est tenté d'abandonner.

d'assurance, il n'y a en rien. on croit parfois le contraire, sentant en soi un point de certitude. et puis ce point s'effondre et on ne sait plus ce qui fait continuité. ce qui fait qu'on dit je, sujet prenant la parole, aspirant à dire vrai. alors on se tait. ou alors le poème. pour en finir avec la vérité. simplement, des mots coulant comme l'eau, comme les poissons remontant le courant. des mots ne prétendant rien d'autre que retrouver la source. la source de ce besoin de dire, de rendre grâce à la vie. laisser quelque chose de beau peut-être, de sincère, d'imparfait. se mettre à genoux, remercier la terre, le ciel et prier pour les hommes et les bêtes et pourquoi pas les cailloux. et tout s'agite autour. pendant ce temps.

on aime toujours sa mère, non ?